eG8, où va l’Internet ?

Dans son discours d’accueil du eG8, le président de la république n’a pas manqué de brosser un tableau qui consacre une prise de conscience de l’importance de l’Internet dans la diffusion des savoirs, de son importance croissante dans le domaine économique, dans la diffusion des bonnes et mauvaises pratiques dans tous les domaines, bien sûr aussi dans le domaine politique comme l’ont illustré de nombreux événements de ces dernières années depuis l’élection d’Obama jusqu’aux mouvements arabes en passant par Wikileaks. Il suffirait donc de réguler pour mieux développer et de supprimer les scories pour avoir enfin un internet civilisé (terme souvent repris par nos gouvernants). D’où l’idée affichée de recueillir les propositions ascendantes (depuis un parterre tout de même choisi) avant peut-être d’édicter des règles… descendantes bien sûr…

Certes, on est évidemment d’accord avec le fait qu’Internet ait pris une importance stratégique, que des freins à son développement subsistent, que des modèles économiques sont remis en cause, que des inquiétudes légitimes se font jour quant à la protection de la vie privée et au droit à l’oubli, à la surveillance, aux problèmes des sources, des effets de masse et des manipulations possibles.

Alors réguler et civiliser le réseau ?

Si j’en crois mon petit Robert, civiliser, c’est « faire passer (une entité sociale) à un état social plus évolué ou considéré comme tel dans l’ordre moral, intellectuel, artistique ou technique ». Il faudrait donc réussir dans le monde d’Internet à dégager une morale commune de laquelle découleraient des règles censées offrir un cadre de développement harmonieux.

Bien, mais alors quelle morale commune ?

  • Celle des grandes entreprises du net qui ne souhaitent pas vraiment s’embarrasser de règles trop contraignantes pour elles ?
  • Celle des industries traditionnelles qui souhaitent faire du vieux avec du neuf (voir Hadopi ancienne formule et son échec annoncé tant on est loin des possibilités intrinsèques du réseau) ?
  • Celle de la privacy à l’américaine ou celles d’ailleurs remises en cause par les propriétés intrinsèques du numérique de la vie privée à l’européenne ?
  • Celle du net tendance chinoise (la Chine n’était pas là) ?
  • ou encore celle des hackers si importants dans la génèse de l’esprit du net, défendant un territoire indépendant et autorégulé ?
  • ou encore celle des pourfendeurs de l’horizontalité (dont on se souvient de quelques interventions) ? …

Une partie de la réponse se trouve dans la liste des intervenants et la composition des plateaux qui a fait la part belle aux géants des grands groupes et du e-business…et les dirigeants de nos agences étaient parmi les invités. Il n’est bien sûr pas illégitime de rechercher les voies d’un développement d’Internet et de son économie, bien au contraire. Mais sans faire de procès d’intention, le voir comme simple espace à normaliser, comme simple extension de l’espace marchand et de l’espace du pouvoir et négliger le fait que l’internaute est au centre d’internet  serait extrêmement réducteur et certainement contre-productif.

Etait-ce une raison de ne pas organiser cet eG8 ? Non, seulement une raison de se montrer attentifs à la route choisie et à toutes les évolutions qui en résulteraient.

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